C’est la sortie du dernier Luca Tahtieazym ! Un livre sombre, glauque et avec des vrais morceaux de méchants dedans ! Bref, une histoire qui sort des sentiers battus, mais s’attendait-on à autre chose ?

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Chroniques thriller

Les larmes écarlates

Luca Tahtieazym a la fâcheuse tendance, pour notre plus grand plaisir, à piocher dans tous les styles. Tout le monde ne peut pas se le permettre, mais lui, par son talent de conteur, fait passer l’histoire avant le genre. De fait, c’est parfois dans le fantastique comme avec La Forêt, ou bien dans le feel-good avec L’homme qui courait sa vie ou encore Le vieil homme et moi, mais aussi dans le thriller avec par exemple La mante nue qu’on retrouve la plume de Luca.

Une trop longue attente se fait sentir entre deux livres de l’auteur, alors parlons tout de suite de son petit dernier, sorti aux éditions Inceptio !

Je vous laisse donc le pitch ici :
Patiemment, en luttant farouchement pour suivre sa propre voie, Mathilde s’est façonné une existence de rêve : voyages autour du globe, reconnaissance professionnelle, aisance financière et… une double vie.
Deux hommes qu’elle aime, deux familles qui ignorent tout l’une de l’autre. Deux mondes aux frontières bien délimitées.
Mais il suffit parfois d’un grain de sable dans les rouages d’une mécanique soigneusement huilée pour que tout déraille. Le jour où une personne de sa première vie fait irruption dans la seconde, un processus tragique se met en marche.
Et très vite, les morts s’enchaînent…

Alors, Luca, de quoi il nous parle ?

Ici, on est donc plongé dans le monde du thriller qui, encore une fois, nous sert une histoire originale avec des ingrédients bien dosés. On retrouve une pincée d’accidents, deux de meurtres, quelques cuillères de retournements de situations et une bonne grosse louche de suspense.

Luca ici met un point d’honneur sur sa protagoniste. En effet, Mathilde est un personnage particulier qui voit les choses d’une manière un peu poétique, dans le fond. Elle réussit à trouver un équilibre émotionnel grâce à ses deux familles. Que ce soit aux côtés d’un chef cuisinier terre à terre ou à ceux d’un peintre rêveur, Mathilde sait avancer de façon discrète et périlleuse sur le fil de ses émotions et de ses besoins.

Pourquoi cet équilibre est-il si fragile ?

C’est tout simple ! Qui dit double vie dit deux familles, deux univers différents qui ne sont possibles parce qu’ils ne se rencontrent pas. Et si, un jour, l’affrontement était inévitable ? Si l’existence d’une tierce personne venait tout foutre en l’air dans ce mécanisme bien rodé ? Vous comprendrez à la lecture de cet ouvrage que tout ne tient finalement qu’à un fil et qu’une rencontre fortuite sur un bout de trottoir peut suffire à faire basculer tout le destin que vous aviez imaginé.

L’intrigue de Luca, qu’est-ce qu’elle a d’original ?

Bah oui, au final, vous devez vous poser la question, parce qu’un personnage qui mène une double vie, c’est assez banal au final, surtout dans le milieu du thriller. Mais méfiez-vous ! Luca, comme je vous le disais, c’est un conteur. Son histoire, au premier abord un peu longue, se transforme très vite en une véritable intrigue qui vous chope au vol.

D’abord, parce que Mathilde est la protagoniste, c’est vrai, mais parce que tout le monde vient la rejoindre sur les devants de la scène. Les personnages secondaires prennent une place plus qu’importante au fil du récit. C’est comme ça que nous rencontrons assez rapidement Paul et ses deux enfants, Caroline et Olivier, Cillian et sa fille Brenna, Marie-Claire et Laurent, mais aussi Serge et madame Lemargnier. Alors, je ne vous avais pas dit que ça faisait du monde ? Et tout ça, ça se mélange au gré de la plume de Luca. Ce dernier nous fait valdinguer d’un couple à un autre, d’une vie à une autre, dans un mélange de pseudo vie professionnelle recoupée par des éléments plus que personnels.

Il faut dire ce qui est, brouiller les pistes, Luca, il aime bien ça. Et nous aussi, hein ? Je vous laisse vous débrouiller de tout cet amas de noms pour vous faire une idée, car pour en savoir plus sur les interactions entre les personnages, il vous faudra lire Les larmes écarlates !

La construction du roman

Pour le coup, on peut ici parler encore d’originalité. Je ne vais pas vous mentir, j’ai cru qu’il y avait eu une « pétouille » dans l’enchaînement des chapitres, croyant qu’ils portaient tous le même nom. Deux options faisaient alors partie des possibles : une petite erreur ou… un auteur qui se moque de son lecteur. Que nenni, mes amis ! Luca ne fait pas d’erreur 😀 , mais surtout, il ne prend jamais son lecteur pour un idiot. Alors les chapitres qui ont le même nom, ça a aussi une explication.

D’abord surprise, j’ai assez rapidement trouvé cette explication, et en plus de tenir la route, je vous laisse deviner qu’elle est super bien pensée. Sans aller épier la fin du livre, je vous conseille de faire comme moi : porter une attention aux chapitres et à leur numérotation. Pour ma part, remarquer cette originalité m’a donné de la frustration, certes, mais m’a aussi permis d’avoir un petit rictus en fin de lecture. Ce petit sourire niais accompagné de la voix intérieure qui dit « pas folle la guêpe, c’est malin ! ».

Enfin, un petit point noir, mais tellement subjectif qu’il pourrait bien être l’ingrédient qui vous attire ! 🙂
De mon côté, j’ai trouvé que cette histoire avait un démarrage diesel. Un monologue qui n’en finissait pas, et j’avoue que j’ai eu du mal à passer ce dernier. Si je suis aussi virulente dans mes propos, vous allez me demander pourquoi je parle de « petit point noir ». J’ai une réponse très simple ! Parce qu’il s’agit là de décor, de scène, de mise en place de l’univers. Bref, même si j’y ai trouvé de la longueur, j’y ai surtout trouvé une implantation des personnages faite de manière aussi subtile que la disposition des pièces dans l’ouverture d’une partie d’échecs. Alors voilà, c’est long, mais c’est bon ! 😉

Enfin, l’écriture de Luca

Eh oui, il faut aussi passer par là. Pour le coup, je manque un peu d’objectivité, mais je sais que vous me le pardonnerez 🙂

Luca a ce don de glisser des termes peu courants dans ses écrits, de ceux qui montrent qu’il aime mettre des mots qui raisonnent au bon moment, au bon endroit. Bien évidemment, je ne vous parle pas de ces écrits lourdauds où vous ne comprenez pas une phrase sans avoir le p’tit Robert à vos côtés, non ! Je vous parle de ce genre de livre où les mots glissent, prennent toute la place qu’ils méritent. S’il y a quelques redondances de situations, il n’y en a clairement pas dans le choix du vocabulaire et de la description. Chaque idée percute, et ça fait toujours plaisir !

En bref (pour ceux qui ont la flemme de tout lire, aussi 😀 )

Même si je ne vous ai pas tant renseignés sur l’intrigue, mais juste par bienveillance, pour ne pas vous spoiler, j’avoue avoir mis tout mon cœur pour vous pointer du doigt l’effort de construction et d’introduction de Luca.

En effet, cette introduction est effectuée intelligemment, que ce soit pour l’ambiance ou pour l’arrivée progressive des personnages. Luca ici fait des nœuds à nos neurones, mais sans jamais nous perdre pour autant. En gros, une toile d’araignée tissée finement dont tous les détours finissent par apparaître.

L’intrigue est bien plus poussée que dans les récits du genre qui m’ont été donnés de lire. La présence de plusieurs personnages dont les destins s’entremêlent est assez rondement menée.

Une protagoniste que l’on juge particulièrement humaine. Eh oui, on a tant envie de lui faire un câlin que de la gifler, et ça, ça rend le personnage crédible ! 🙂

Enfin, une écriture fluide et percutante, des mots qui résonnent et raisonnent pour un très bon moment de lecture ! Vous l’aurez compris, je vous le conseille 😀

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