Plus rien à perdre

Bon, et si on commençait par un résumé ?
Miami, 2018
Le hasard a mis l’un de ces salauds sur ma route.
Je me suis juré de tous les éliminer.
Un par un.
Si les flics me chopent, ce sera la chaise électrique ou l’injection létale.
Je ne sais pas quel sera mon choix si l’on me pose un jour la question.
Cela dit, je n’en ai plus rien à foutre… Je suis déjà mort il y a cinq ans.

Alors franchement, je commencerai par dire que l’auteur fait bien de dédier ce livre à ses filles en s’excusant d’avance pour les mots employés 🙂 Pourquoi ? Parce que c’est du brut de décoffrage, vraiment. Et c’est tant mieux. Il faut dire ce qui est, dans ce genre d’histoires, on ne peut pas avoir un langage d’académicien. Nous avons donc un homme détruit, perdu, avalé puis vomi par la vie, par l’événement qui aura donné à ses jours un goût d’enfer, d’amertume, de colère et surtout de peine. Cet homme fini, qui assume le fait de ne plus avoir quoi que ce soit à perdre, ne vit désormais que pour la vengeance. Celle qui lui redonne un peu de force et le fait se maintenir debout. Qui aurait cru qu’une virée dans un bar miteux, dans une soirée de malheur, aurait pu donner en effet matière à cette vengeance qui jusque là ne semblait qu’impossible ?

Du coup, comment ça se passe ? Il faut dire qu’on suit la descente aux enfers de Marshall, cet homme dont la vie s’est arrêtée en 2013 suite aux assassinats violents de sa femme et de sa fille. Alors qu’il se jette lui-même des reproches en tout genre et se culpabilise de cette horreur, il tombe toujours plus bas, jusqu’à oublier ses proches, renier son ami d’enfance afin de se laisser aller à une vie dirigée par l’alcool, le café et les clopes 😉
On garde alors ce langage parfaitement choisi et très bien utilisé. L’auteur lui prête une façon de parler qui lui est propre, propre à ce genre de personnes bafouées, ces coquilles vides qui n’en ont « plus rien à foutre ». Toute la narration nous plonge dans la tête de Marshall, dans ses pensées, dans son envie de lutte… Appropriés, les termes apposés par l’auteur font sens et nous entraînent un peu plus avec ce héros un peu particulier. D’ailleurs, on sent un changement sémantique dans les passages où ils se souvient des siens et les passages actuels, ceux dans lesquels on se fait dévorer par la violence et le besoin de représailles. Rien que dans la forme, ce bouquin est énorme.
La plume, de façon plus générale, est fluide, les mots coulent tout simplement et dénoncent page par page un peu plus des sentiments que le lecteur ne pourra pas ignorer. Tout est bien en place, et bien pensé. (Même quelques petites boutades se présentent de temps à autres : pas assez nombreuses pour que ça en soit lourd, juste ce qu’il faut pour casser l’ambiance morbide… avec un petit clin d’oeil qui va bien dans la gestuelle des personnages.)

Maintenant, l’ambiance… Vous aimez ces films un peu rock and roll, de l’action à n’en plus finir, des machos musclés qui viennent se pavaner avec des armes, mais qui n’ont pas de mauvaises intentions dans le fond ? Des gentils qui ont soif de vengeance ? Et de ces histoires où il y a de vrais morceaux de méchants dedans ? Alors voilà, ce bouquin, il est fait pour vous ! L’écriture vous fait entrer directement en situation, pas de fioritures, pas d’introduction… la bombe est posée dès les premières pages. Pour les autres, on les tourne et ce, frénétiquement. Parce qu’il n’y a pas de pause, pas de temps mort, parce que les intentions prêtées au protagoniste sont plus que largement compréhensibles, parce que… voilà, tout y est, vraiment.
Entre le gros dur et le gros tendre, nous avons ici un héros malgré lui qui vaut le détour, qui est profondément humain (de par tous ses aspects : parfois idiot, un peu benêt, mais aussi tendre, intelligent, volontaire et aimant). Ce personnage-là, celui de Marshall, le lecteur le suit de force, du début à la fin. On entre dans sa tête et on en ressort qu’à la dernière ligne, celle qui, là aussi, est bien emmenée.

Pour finir, les décors. On a là aussi un côté minimaliste qui est très appréciable. On voit tout de suite l’ambiance, l’idée, les images se collent à la rétine sans que l’auteur en fasse des caisses. À travers les lignes, le lecteur n’a aucun mal à visualiser l’appartement, la boîte de nuit ou encore le bar à la clientèle critiquable, et ça, c’est bon 😉

Que dire de plus ? Je ne vois pas trop sans spoiler.
J’en retiendrai que nous avons là un très bon livre du genre (genre qu’il faut aimer ceci dit 😉 ). Les personnages sont crédibles et bien menés, l’intrigue se met en place vite et bien et, même si quelques anecdotes peuvent paraître capillotractées, l’auteur retombe toujours sur ses pattes. Bref, un livre d’action qui passe crème, se lit très vite et surtout très bien.
Pour ma part, je n’ai eu aucun problème d’identification avec le personnage principal : il prenait un café, moi aussi, il allumait une clope, mois aussi. S’il y a un point noir à noter, ce serait d’ailleurs celui-ci : je ne crois pas avoir autant fait de pauses café/clope dans mes lectures. Comme je le disais l’autre jour, c’est à ça qu’on reconnaît les bonnes mises en place : quand vous voyez quelqu’un se servir un verre à l’écran et que ça fait mouche, que vous vous dites « c’est l’heure de l’apéro »… 😀 Là, c’est pareil, on le suit dans tous ses travers, alors David, je ne te remercie pas, même si moi aussi j’adule littéralement ce moine éthiopien 😀

Bref, je pense que vous l’aurez compris, amateurs d’action, de bons sentiments et de vengeance, vous tenez une perle, foncez ! 🙂

Bonnes lectures à tous ! 🙂

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